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Juridictions spéciales... Jusqu’au bout !

jeudi 28 septembre 2006, par NLPF


DEPUIS le 23 janvier 2006, de nouvelles dispositions régissent le traitement des demandes de liberté conditionnelle des camarades d’Action Directe : un article de la loi promulguée à cette date institue en effet une nouvelle juridiction spéciale, sous prétexte de lutter contre le terrorisme.

Après les mesures prises pour la garde à vue lors de leur arrestation, les conditions particulières appliquées lors de la détention, l’institution de cours d’assises spéciales (uniquement composées de magistrats) pour leurs procès, c’est maintenant une structure centralisée qui est chargée d’examiner leurs demandes de libération conditionnelle. Jusqu’au bout, l’État français met en place des juridictions spéciales dans sa guerre contre les militants révolutionnaires. Huit textes en dix ans et trois textes récents : la notion de « terrorisme » entraîne une véritable inflation de dispositions pénales qui vont toujours plus loin dans l’installation de juridictions spéciales, sans même parler de l’arsenal progressivement mis en place dans l’Union européenne. Il n’y a pas qu’aux États-Unis que l’on assiste à la disparition progressive des derniers garde-fou susceptibles de s’opposer à la toute-puissance de l’État.

En janvier 2006 a été promulguée la « loi relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers ». Parmi les décisions, applicables aux militants révolutionnaires emprisonnés, l’article 14 concerne les demandes de mise en liberté conditionnelle. Celui-ci indique :

« Par dérogation aux dispositions de l’article 712-10 [du code de procédure pénale], sont seuls compétents le juge de l’application des peines du tribunal de grande instance de Paris, le tribunal de l’application des peines de Paris et la chambre de l’application des peines de la cour d’appel de Paris pour prendre les décisions concernant les personnes condamnées pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 706-16, quel que soit le lieu de détention ou de résidence du condamné. »

« Ces décisions sont prises après avis du juge de l’application des peines compétent en application de l’article 712-10. »

« Pour l’exercice de leurs attributions, les magistrats des juridictions mentionnées au premier alinéa peuvent se déplacer sur l’ensemble du territoire national, sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 706-71 sur l’utilisation de moyens de télécommunication. »

Cet article indique clairement qu’il s’agit d’une disposition particulière prise pour une seule catégorie de prisonniers et que, dorénavant, toutes les décisions sont centralisées à Paris. Cela concerne aussi bien Nathalie, Jean-Marc que Georges (alors que, jusqu’à présent, c’étaient les juridictions dont leur lieu de détention dépendait qui étaient compétentes).

Si cette loi a donné lieu à quelques mobilisations (concernant la surveillance des accès Internet et des communications électroniques par exemple), cet article n’a pas attiré particulièrement l’attention. C’est qu’il concerne un nombre très restreint de prisonniers, que l’on agite le chiffon rouge du terrorisme - sous-entendu international - pour le faire passer et que, de toute façon, la prison mobilise encore trop peu.

Et pourtant, c’est bien là le dernier maillon d’une chaîne redoutable qui parachève les dispositions spéciales. Et peut-être le plus redoutable puisqu’elle permet le maintien en détention ad vitam æternam, puisqu’elle remet entre les mains d’une juridiction particulière la possibilité existant normalement pour chaque détenu d’obtenir une libération.

Nous savons bien que toute libération - surtout pour les prisonniers révolutionnaires - reste de toute façon exceptionnelle et arbitraire. Les chiffres, en France, révèlent combien cette libération est plus que discrétionnaire. Mais il y a discrétionnaire et discrétionnaire... Pour les prisonniers politiques qui ont choisi la lutte frontale contre l’État, obtenir leur libération était déjà mission pratiquement impossible. Toutes les demandes déposées par les camarades d’Action Directe ont ainsi essuyé un refus, même si elles répondaient aux critères de logement et d’emploi. Joëlle Aubron, seule, a pu quitter les geôles de l’État : mais après mobilisations et luttes et parce que, comme ils le disent : « le pronostic vital était engagé ».

Locales ou non, les juridictions ont toujours été clairement aux ordres du pouvoir. Mais une chose est la pratique et une autre l’institutionnalisation de cette pratique. Aujourd’hui, il est clair et net que c’est l’État, par l’intermédiaire de la juridiction parisienne, c’est-à-dire un juge d’application des peines « antiterroriste » siégeant à Paris, qui rendra les décisions. Et c’est cela qui s’inscrit dans la loi !

En quoi cela change-t-il ce qui se fait déjà ? Peu en pratique (pour nos camarades), beaucoup en principe. En effet, l’État attend des militants révolutionnaires en prison qu’ils se « repentent », qu’ils renient leurs convictions. C’est le critère qui sous-tend ses décisions.

Ensuite - on peut toujours rêver - s’il existait quelque part un juge susceptible d’indépendance, l’ancien dispositif lui permettait d’agir. Le nouveau exclut cette possibilité. Enfin, cette disposition vise à neutraliser les soutiens locaux qui s’étaient peu à peu organisés.

Nathalie Ménigon devrait bientôt étrenner cette nouvelle disposition. Il est même prévu qu’elle ne soit pas « extraite » de la prison, l’audience pouvant se dérouler par visioconférence. Il est donc indispensable que nous restions vigilants et mobilisés, où que nous soyons, pour faire face à ce nouveau dispositif.




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